Une visite à l'Arbizon

Cela faisait deux ou trois ans que j'y pensais et la période semblait propice. Objectif : la crête Petit Arbizon - Arbizon.

Un départ matinal me conduit à 7h15 à la hourquette d'Ancizan. La plaine est sous les nuages bas, Arreau est dans le brouillard et le soleil brille en altitude. Je m'élève sans traîner jusqu'à la coume de la Maoubé, il ne faudrait pas que la douce température ramollisse la neige trop tôt ! Dans la coume de la Maoubé, vers 2150m, je chausse les crampons, au début plus par confort que par nécessité. Je commence la remontée sans histoire du cône déversoir du couloir du Petit Arbizon avant de sombrer soudainement dans un secteur de neige fondue et regelée mais sans tenue (type gros sel) : je m'enfonce à chaque pas jusqu'au genou, dans ce qui ressemble à de la glace pilée. Dans quoi suis-je donc tombé ? Cette galère dure une vingtaine de mètres avant de retrouver de la bonne neige bien ferme. La suite de la remontée du couloir se fait tranquillement, seuls quelques minuscules morceaux de glace descendent parfois dans le canal d'évacuation, bien creusé. Je débouche enfin vers 9h45 sur la crête. Deux grosses plaques de neige sont accrochées à la paroi, exposées au nord-est, en surplomb du couloir : je n'aimerais pas m'y trouver si jamais elles partent...

J'enlève les crampons pour monter au Petit Arbizon, mais je garde le piolet : l'attaque du premier mur est recouverte de neige glacée et me pose quelques problèmes avant d'être franchie victorieusement. Au sommet du Petit Arbizon, à peine un souffle de vent, vue splendide sur la chaîne et toujours la plaine sous les nuages.

Retour au sommet du couloir pour suivre la crête vers l'ouest jusqu'à l'Arbizon. Elle est globalement déneigée, sauf quelques portions horizontales et au franchissement des trois brèches. La première brèche me pose d'ailleurs un sérieux problème : je suis la crête sagement, quand celle-ci se dérobe pour tomber verticalement. Par où passe-t-on ? Je tente un passage sur le flanc nord, erreur, ça n'est certainement pas par là. Je passe alors en flanc sud, où je trouve, seuls et isolés sur cette crête, deux cairns qui ont résisté à l'hiver. Insuffisants pour m'indiquer le passage exact, ils me confortent cependant dans ma recherche qui me conduit finalement à la brèche, partiellement enneigée. Une seule voie de sortie : pleine crête, sur un rocher médiocre et peu fiable. Les deux brèches suivantes, proches du sommet, sont peut-être un peu plus difficiles techniquement, mais le rocher est (enfin !) de bonne qualité. Avant d'atteindre le sommet, l'Arbizon dresse sa dernière défense : à la jonction de la crête provenant de l'Escalère, une importante accumulation de neige dresse une pente raide. À 11h30, je suis au sommet. Le temps est toujours beau, avec un ou deux nuages de brume qui s'élèvent du fond des vallées.

Je décide de continuer mon grand tour de l'Arbizon pour revenir par le lac d'Arou. Je descends donc vers l'ouest. Le flanc sud est presque totalement déneigé, seules quelques plaques isolées y survivent encore.

Parvenu à ce que je suppose être la brèche occidentale de l'Arbizon (la carte, l'altimètre et la vue sont tous d'accord), j'hésite entre descendre par ce couloir ou rejoindre plus loin le couloir de la brèche de Montfaucon. Ce couloir-ci est exposé au nord-ouest, l'autre à l'est en plein soleil depuis plus de quatre heures, et je décide que je préfère la neige un peu dure avec crampons. Je rechausse les crampons et m'engage dans ce couloir bien raide. Au premier tiers de la descente, le couloir se rétrécit et un petit mur vertical recouvert de glace semble le rendre impraticable. La fatigue me fait insister un peu stupidement et une désescalade scabreuse (avec crampons) dans le flanc du couloir me permet de contourner l'obstacle pour prendre pied en dessous sur la neige glacée. Une dizaine de mètres plus bas, le couloir s'élargit et la neige devient moins dure. Il aurait cependant été plus sage de passer par le couloir du Montfaucon.

L'enneigement dans le fond du vallon est discontinu, mais en profitant de langues de neige, j'évite les éboulis jusque vers 1950m. Le retour depuis le lac d'Arou n'en finit pas jusqu'à la voiture, que j'atteins après 14h. Pendant ce temps, le ciel s'est chargé et l'Arbizon a totalement disparu dans les nuages.

J'ai longtemps été perturbé par une toponymie confuse entre Miguel Angulo et Francis Mousel : Angulo distingue deux couloirs (un couloir proche du sommet nommé couloir occidental et le couloir issu de la brèche O de l'Arbizon), alors que Mousel parle seulement du couloir occidental (« couloir à 45 degrés, jusqu'à un mur raide avec un bloc coincé. Quelques mètres délicats (glace) »). Il s'agit bien du couloir que j'ai emprunté, issu de la brèche occidentale, qui constitue une voie envisageable de descente hivernale. (ajout du 17/11/2002)

Course effectuée le vendredi 25 mai 2001.

Petit Arbizon Couloir du Petit Arbizon Arbizon depuis Petit Arbizon Couloir Occ. de l'Arbizon
Petit Arbizon Au sommet du couloir
du Petit Arbizon
Arbizon depuis
le Petit Arbizon
Couloir de
la brèche Occ.

(la première photo date d'une autre sortie)